Votre quotidien loupeguinee dans sa mission d’informer s’est intéressé au secteur l’éducation dans son volet ‘enseignement. Sur ce,et pour en savoir de plus, nous avons réalisé un entretien sans langue de bois avec Mamadou Cellou Barry, professeur chargé des cours de français au collège Saifoulaye Diallo de Gbessia dans la commune de Matoto. Avec lui, nous avons abordé certains points liés à la problématique du système éducatif.
Notre rédaction vous propose cette interview en exclusivité.
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Loupeguinee.com :En tant que éducateur quel regard portez vous sur le système éducatif guinéen ?
Merci , le développement d’un pays commence par l’éducation. Mais si dans un pays l’éducation est altérée ce qui veut dire que le progrès est altéré. L’avenir appartient à la jeunesse. Je suis fier d’être guinéen mais je meurs d’amertume. Aujourd’hui je ne vois aucun avenir pour la Guinée et les guinéens.
Pourquoi vous êtes pessimiste ?
L’éducation est en perpétuelle dégradation, je n’accuse pas les élèves. On a tendance à dire que le niveau des élèves est bas non, c’est le système qui a un niveau bas. Le système éducatif guinéen a un niveau très très bas , on peut dire même sous-terrain. Et quand le niveau du système éducatif est bas cela a pour conséquence la baisse de niveau des élèves.
Sur quoi vous vous basez pour dire le système éducatif guinéen est de niveau très bas?
J’ai commencé par dire que je suis professeur de langue française , je suis en situation de classe et j’ai mon emploi de temps, mais le programme que je donne est au dessus des élèves . J’ai deux classes de la 10ème année et dans ces classes je n’ai qu’une seule fille qui sait lire et si je dis lire c’est à la lecture comparable à un élève de la 4èime année. Dans mes classes aucun élève ne peut conjuguer un verbe du premier groupe de tous les temps et modes.
Le français est la langue officielle, la langue du communication du pays , et un élève qui ne peut pas lire entre les lignes ne pourra pas défendre un projet qui est soumis à la Guinée. Nous avons des élèves qui ne peuvent pas rédiger une lettre, qui ne savent la différence entre un nom et un verbe qui ne connaissent pas un adjectif c’est dommage ! Voilà des preuves .
Vous parlez du système c’est quoi le système ?
C’est tout un ensemble, dans ce système le premier responsable c’est l’Etat ,celui qui doit coordonner .Nous avons le ministère qui s’occupe de l’éducation, nous avons les enseignants ,les partenaires techniques et financiers , les élèves et les parents d’élèves . Il y’a une contrainte pour amener l’enseignant à faire du bon travail, faire comprendre à l’élève qu’il est à l’école et il doit apprendre, faire comprendre aux parents qu’ils ont des enfants à l’école pour leur avenir.
Le mot élève veut dire quoi ? L’elever pour son avenir, pour son futur, mais tout à fait le contraire aujourd’hui, tout le monde a démissionné . L’Etat fait semblant d’ouvrir les écoles, l’enseignant fait semblant d’enseigner , l’élève fait semblant d’aller à l’école et les parents font semblant d’envoyer leurs enfants à l’école, c’est la catastrophe.
Tous ces champs politiques , qu’on pense à l’avenir et au bonheur de tout et chacun mais c’est faux , on ne peut développer un pays sans passer par l’éducation. Tous les pays développés ont passé par l’éducation. On éduque pas un enfant pour ses parents mais pour la nation , pour son pays, pour la société, l’éducation est obligatoire. Tout est politique en Guinée, je suis écoeuré. Parlons un peu de l’avenir qu’est ce que la jeunesse guinéenne va dire en 2030 devant la jeunesse marocaine , camerounaise, canadienne, sénégalaise dans cette mondialisation ? Nous sommes sur une bombe qui va exploser dans 15 ans et ce n’est pas une bombe politique ou nucléaire mais une bombe sociologique. Il y a des élèves qui ont fait l’examen trois fois ils sont dans la rue , le BEPC ils ont abandonné dans la rue , certains ont trois fois le bac ils ont abandonné dans la rue, d’autres ont fini l’université ils n’ont pas de travail et le nombre ne fait s’accroître donc nous sommes en train d’enregistrer des frustrés , des frustrés mal formés. Tout le monde
s’adonne à guineegams. Rien n’est plus grave que dans un pays une personne pense avoir les études et croire connaître étant donné qu’elle ne connaît rien c’est grave , c’est une bombe. Celui qui pense qu’il a son diplôme étant donné qu’il n’a aucun niveau c’est une bombe.
Tous ceux ci dans 15 ans auront 35 ans, et ils seront récupérés par qui ? Par les bandits, par les terroristes , les narcotrafiquants donc c’est l’insécurité à jamais. Le discours politique n’est sert à rien. Si on ne s’occupe pas aux jeunes ils vont nous apporter des occupations.
Mamadou Djiwo Bah 00224664379620