Lorsque nous étions des enfants, des gamins sans chaussures et avec des culottes dérangeant des odeurs d’urine, nous vivions sur un bowal et sous des manguiers. Un jour, c’était une période pluvieuse, loin de moi, dans un secteur différent du mien, une femme, la mère d’un ami est décédée. Dans ce village, c’était de la tristesse. Je venais de comprendre pour la première fois qu’une personne décédée n’allait jamais revenir, et que pour l’éternité, nous allions plus revoir la mère d’Alseny. L’ange de la mort était cruel. Il était méchant et il a profité de la maladie de la femme pour lui arracher la vie, le plus beau cadeau que Dieu, dans sa grande bonté, a donné aux humains.
Ce jour, tout un village était calme, silencieux. Comme si la vie était au ralenti. Nous, les enfants avions peur… On rasait le mur, doucement, sans faire de bruit, pour retrouver notre camarade. Ce jour, aucun enfant du village n’a joué avec le ballon. La musique s’est tue. Les adultes parlaient sans crier et tout le monde respectait le deuil. Nous n’étions pas de la même famille, mais on respecter la période de deuil.
Les années sont passées et sans connaître la raison, j’ai appris à arrêter tout mouvement lorsque les fidèles musulmans accompagnent une personne décédée à sa dernière demeure. Les adultes parlaient sans crier et tout le monde respectait le deuil.
Des années après, les périodes de deuil ne durent plus dans nos villages. Dans nos villes, la vie humaine est banalisée. Les larmes coulent en fonction de l’ethnie de la dépouille. Les enterrements se passent dans la violence, le cimetière est profané par les tirs de gaz lacrymogène. Même l’ambulancier n’est plus épargné. Une fois, un ambulancier a été tué à Labé. Même les cercueils ont été confisqués et rendus à Conakry en 2019.
Parfois, les dépouilles sont instrumentalisées. Si tu meurs dans certaines conditions, certains jours et dans certaines zones, il est difficile pour tes parents de t’enterrer dignement. Parfois, les dépouilles sont instrumentalisées. À wanidara, une famille endeuillée par la mort d’un jeune a été surprise par le gaz lacrymogène, alors que les voisins étaient venus présenter les condoléances.
Tuer une personne est devenu un acte banal. Les enfants n’ont plus peur. Les adultes ne montrent plus de signes de compassion. Des morts, des morts et encore des morts. La vie humaine n’a plus aucun respect en Guinée.
Abdoulaye Ciré Diallo journaliste 00224664379620