Chers lecteurs, loupe-confidence braque aujourd’hui sur Fatim qui nous fait part de sa vie et demande de l’aide.
Lisez !
« Bonjour, je m’appelle Fatim. J’ai grandi dans une famille nombreuse, avec 18 frères et sœurs, mon père ayant 3 femmes. Ce qui a rendu ma vie d’enfant compliquée, c’est la concurrence qu’installaient entre nous nos mamans. Il nous fallait toujours faire mieux que les autres. Ma mère n’avait eu que des filles et s’attirait pour cela les moqueries de ses coépouses.
Pour nous faire apprécier de notre père autant qu’il aimait ses fils, nous devions nous montrer, en tout point, leurs égales, et en même temps nous devions assumer les tâches de la maison. Ce qui voulait dire en faire beaucoup plus : être de bonnes élèves, sages et studieuses, tout en effectuant les travaux ménagers sans se plaindre.
Ma mère aurait tellement aimé avoir un garçon. Mes sœurs et moi faisions du mieux que nous pouvions pour être le plus proche possible de notre père et gagner son estime. Pour rendre notre mère heureuse. Je crois que de nous toutes j’étais celle qui y parvenait le mieux. Et quand, après plusieurs années d’un travail consciencieux, j’ai finalement obtenu mon bac, mon père est allé à la banque. Fier et bien décidé à offrir le meilleur à la plus douée de ses filles, il a pris un crédit pour m’envoyer poursuive mes études au Maroc.
Là-bas, j’ai fait la connaissance d’un jeune Africain avec lequel j’ai flirté un petit moment, mais ça n’a pas marché. Nous n’étions pas d’accord sur de nombreux sujets et on avait du mal à envisager notre vie ensemble sur le long terme. Nous avons finalement rompu au bout de la deuxième année.
En troisième année de Droit, j’ai rencontré un autre jeune étudiant, un Européen avec lequel je m’entendais très bien. Il me faisait beaucoup rire et pouvait parler de tout et de rien, sans tabou. Il était au Maroc pour quelques mois seulement, et à la fin de son séjour, il m’a proposé de partir avec lui en France. Toute contente et en même temps très amoureuse, j’ai appelé ma mère pour lui en parler.
Elle ne voyait aucun problème à cela tant que je continuais mes études. Mon compagnon a fait les papiers pour que je puisse entrer à l’université. Comme j’avais fait quelques petits boulots pendant les deux dernières années, j’ai pu acheter moi-même mon billet d’avion.
Il m’a proposé de vivre dans son studio pour les premières semaines, pendant que lui irait loger chez un ami, le temps pour moi de trouver un job à temps partiel chez Mc Donald’s ou autre. Mon père faisait toujours beaucoup d’efforts pour envoyer de l’argent tous les mois. Il était tellement fier de moi. Mes frères et sœurs avaient déjà mis fin à leurs études, certains étaient mariés et avaient des enfants. Il aurait tant aimé venir me voir, mais il disait qu’il ne lui restait pas assez d’argent pour cela.
Au fil des mois, mon amoureux a souhaité qu’on vive ensemble. J’ai refusé, je ne voulais pas vivre avec lui avant d’être sa femme. Quand il m’a demandée en mariage, j’étais tellement heureuse ! J’ai appelé ma mère, elle était très surprise et m’a dit que mon père ne devait pas être au courant pour l’instant. « Mon fiancé est quelqu’un de très bien, il me respecte et respecte ma culture, lui ai-je répondu. » Ma mère n’a pas insisté, mais elle m’a dit : « Ma fille, viens nous voir. Tu en as terminé avec l’école, reviens. »
J’ai dit à mon amoureux que je ne pouvais pas me marier avec lui avant qu’il ait rencontré ma famille. Il était d’accord et j’ai prévenu ma mère que nous allions préparer notre voyage. Je lui ai aussi demandé d’en parler à mon père. Nous avons convenu avec elle que nous devions nous marier sur place, un mariage purement administratif, afin que je puisse obtenir un titre de séjour après l’expiration de mon visa d’étudiante. Nous pourrions ensuite envisager un beau mariage coutumier et religieux.
Deux mois plus tard, nous voilà au pays. J’étais tout excitée de revoir mes sœurs, mon père et surtout ma mère… Nous avons été très bien reçus. Mon père n’a manifesté aucun mécontentement vis-à-vis de notre relation. Il nous a dit qu’il fallait organiser un grand mariage, et pas un mariage à la va-vite, car c’était celui de sa fille qui avait le mieux réussi. Nous avons fixé une date, nous avions 6 mois pour tout organiser.
Mon fiancé devait rentrer au bout de 2 semaines et j’avais décidé de rester encore quelques jours pour profiter de ma famille et amorcer les préparatifs. Deux jours avant son départ, alors que j’étais seule avec mon père, celui-ci m’a dit : « Ma fille, tu ne seras pas heureuse avec lui, c’est un Européen, il ne peut pas aimer une Africaine toute sa vie. » Il a ajouté : « Laisse-le rentrer, je connais quelqu’un de bien ici pour toi. » J’ai été extrêmement choquée par ses mots, comment pouvait-t-il penser à des choses pareilles, lui, mon père, que j’avais toujours vu comme quelqu’un de sage ? C’est à ce moment-là que j’ai compris qu’il avait déjà planifié mon avenir et choisi mon futur époux.
Ce qu’il ignorait, c’est que j’étais déjà mariée. Nous avions fait ça rapidement, à la mairie, quelques jours après notre arrivée. Seules ma mère et mes sœurs étaient dans la confidence. Et maintenant je suis effondrée. Mon monde semble s’écrouler. Je me sens coupable d’avoir embarqué ma mère dans ce que mon père va considérer comme une trahison. Dois-je respecter le choix de mon père, qui m’a toujours soutenue et s’est sacrifié pour ma réussite ? Et passer ma vie avec un homme que je n’aurai pas choisi, qui sera peut-être polygame ? Dois-je écouter mon cœur, au risque de décevoir celui que j’ai tant cherché à rendre fier ? Au risque de déshonorer ma mère à ses yeux ? Je ne cesse de pleurer et je ne sais plus quoi faire… Je ne vois aucune issue. »
Laure Tomben 00224664479620 onetopic84@gmail.com