La commission électorale nationale indépendante a été créée conformément aux articles 2 et 132 de la Constitution et à l’article 2 du code électoral. Cette institution est chargée de l’établissement et de la mise à jour du fichier électoral, de l’organisation, du déroulement, de la supervision des opérations de vote et de la proclamation des résultats provisoires.
Elle est dotée de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, elle a son siège à Conakry.
Cette institution en charge des élections, est techniquement aidée par les départements ministériels concernés par le processus électoral (Ministère de l’administration du territoire et Ministère de l’intérieur). Avant, au niveau de la direction centrale,
l’institution était composée de 25 membres dont 10 choisis par les partis politiques de la Mouvance, 10 par les partis politiques de l’opposition, 3 membres désignés par les organisations de la société civile, et deux membres désignés par l’administration. Ils ont un mandat de 7 ans non renouvelable. Après les élections présidentielles de 2015, l’on a assisté à une réorganisation de l’institution. L’on est passé de 25 membres à 17 avec : 7 membres pour la mouvance, 7 membres pour l’opposition, deux pour la société civile et 1 pour l’administration.
Par ailleurs, il serait important de rappeler que Cette institution a été créée dans un contexte de crise opposant la mouvance et l’opposition dans la lutte contre les fraudes électorales. A l’époque, les partis politiques de l’opposition avaient estimé que les ministères en charge des élections étaient inféodés à l’état, d’où la nécessité de créer une structure neutre pour l’organisation d’élections crédibles.
Sa création devrait donc permettre à la démocratie guinéenne d’avoir des structures de gestion électorale neutres, efficaces et transparentes. Ainsi, sa force résidait donc dans sa capacité à rendre le processus électoral fiable en ralliant la confiance du peuple, et en contribuant à la démocratisation des processus électoraux de la Guinée.
La question que l’on se pose aujourd’hui, est de savoir si cet objectif a été atteint ? la réponse est sans aucune ambiguïté non, dans la mesure ou les différentes élections organisées par cette institution pendant les 10 dernières années n’ont pas permis de démocratiser le processus et de respecter la vérité des urnes.
A tous les niveaux, le processus a été biaisé avec pour conséquence un cortège de crises post-électorales. La fraude électorale a été le leitmotiv de cette institution en complicité avec l’état pendant le régime Alpha Condé. Ainsi, au regard de ces faits, un diagnostic profond est nécessaire en vue de corriger les erreurs du passé et de rendre le processus fiable et accepté de tous.
C’est dans ce sens que l’on parle de la refondation du système. Pour cela, deux scenarios sont envisageables
Le premier scenario, est de dépolitiser la CENI pour y mettre un maximum d’agents statisticiens, d’informaticiens, de sociologues et anthropologues pour analyser le plus scrupuleusement les défaillances du système et l’améliorer pour l’adapter au fil des scrutins.
La CENI dans sa configuration actuelle, n’est pas une structure indépendante, mais plutôt représentative, or, la logique voudrait que l’institution soit indépendante de toute structure (société civile ou partis politiques). C’est pourquoi :
-Les membres de la CENI doivent être choisis sur la base d’un concours de recrutement organisé par un cabinet indépendant. L’on doit d’abord déterminer les besoins de l’institution sur le plan des ressources humaines, ensuite, l’on procédera à un appel aux candidatures, puis un concours de recrutement.
Le recrutement se fera ainsi sur la base de la méritocratie, donc les compétences resteront les principaux critères de recrutement. A cela s’ajoutera le coté intègre de chaque candidat recruté, sans oublier leur probité morale.
Ainsi, les candidats retenus auront la lourde tâche de mener le travail technique pour la démocratisation du processus. Cependant, si les partis politiques doivent siéger, leur rôle doit être déterminé. Ils peuvent avoir la qualité de membre en exerçant un travail de veille. Mais, le travail technique doit revenir à des personnes indépendantes de toutes structures et recrutées selon les besoins de l’institution.
-Le deuxième scenario serait de confier l’organisation des élections au gouvernement de transition, donc au ministère de l’administration du territoire et de la décentralisation, en ce sens qu’il n’est partie prenante aux élections. Le CNRD et son gouvernement feront l’arbitrage entre les différents compétiteurs. Cela permettra d’économiser et de rendre l’administration publique crédible vis-à-vis des citoyens.
En somme, l’alternance démocratique à travers des élections libres et transparentes est essentielle dans le processus de développement d’une Nation, c’est pourquoi le respect de l’expression populaire à travers le travail d’une institution électorale neutre est primordial. Ainsi, la refondation de la CENI doit être le fer de lance de cette transition.
Nous ferons d’autres recommandations dans nos prochaines publications.
Sonny Camara politologue, sociologue, administrateur général du site Guinée Nondi